Pour Nietzsche (1844-1900), la vérité est une illusion, une erreur dont nous avons besoin pour vivre. Nous devons prendre conscience que la vérité n’est jamais que notre point de vue, une perspective qui est nôtre et que la vie nous impose d’imposer comme vraie. C’est une lutte sans merci.

"Vous avez servi le peuple et la superstition du peuple, vous tous, sages célèbres ! — vous n’avez pas servi la vérité ! Et c’est précisément pourquoi l’on vous a honorés. Et c’est pourquoi aussi on a supporté votre incrédulité, puisqu’elle était un bon mot et un détour vers le peuple. C’est ainsi que le maître laisse faire ses esclaves et il s’amuse de leur pétulance. Mais celui qui est haï par le peuple comme le loup par les chiens : c’est l’esprit libre, l’ennemi des entraves, celui qui n’adore pas et qui hante les forêts. Le chasser de sa cachette — c’est ce que le peuple appela toujours le « sens de la justice » : toujours encore il excite contre l’esprit libre ses chiens les plus féroces. « Car la vérité est là : puisque le peuple est là ! Malheur! malheur à celui qui cherche ! » — C’est ce que l’on a répété de tout temps. Vous vouliez donner raison à votre peuple dans sa vénération : c’est ce que vous avez appelé « volonté de vérité », ô sages célèbres !... Véridique — c’est ainsi que j’appelle celui qui va dans les déserts sans Dieu, et qui a brisé son cœur vénérateur.[1]"

[1] : F.NIETZSCHE, Œuvres Complètes, Ed. Vassade, Ainsi parlait Zarathoustra, 1883-5, deuxième partie, les sages célèbres, Ed. Kindle